La terre est une ressource locale présente quasiment partout, elle possède une très grande variabilité. La géologie du sous sol selon les paysages, et les terres qui en sont extraites ne sont pas toujours adaptées à toutes les mises en oeuvre.
L’utilisation de la terre crue dans la construction requiert une étude de convenance pour évaluer les caractéristiques du matériau et déterminer s’il est adapté aux besoins spécifiques du projet.
Cette étude, réalisée idéalement sur site en amont, comprend des analyses permettant de confirmer la faisabilité de l’utilisation de la terre locale. Les informations suivantes détaillent les étapes de l’étude de convenance, les tests in situ et en laboratoire, ainsi que les principaux critères de validation.
Ces tests de convenance permettent de comprendre les caractéristiques de chaque terre en fonction de ce qui nous intéresse pour la construction : teneur en matière organique, granulométrie, présence et activité des argiles pour la cohésion, propriétés de gonflement et retrait, teneur en eau et état hydrique.
L’étude de convenance doit être intégrée des la phase de conception de l’ouvrage.
La caractérisation de la matière se fait en croisant deux approches : les essais de laboratoire conduisant notamment à la classification GTR par les géotechniciens, et les essais de terrains développés par des maçons de terre, des géologues, ou encore des agronomes pour qualifier les sols.
Les essais de terrains sont issus des pratiques de maçons spécialisés dans la construction en terre crue et des pédologues. Ils sont importants car, comme leur nom l’indique, ils sont réalisables sur place et ne nécessitent pas beaucoup de matériel.
1. Préparation et collecte d’échantillons
• Objectif : Prélever des échantillons de terre directement sur le site du projet, aux différentes profondeurs pertinentes.
- Processus : Réaliser des prélèvements soigneusement, marquant chaque échantillon pour une analyse cohérente et représentative de la terre disponible. Cette étape permet de vérifier si la terre répond aux exigences du projet envisagé (mur en pisé, briques d’adobe, enduits, etc.). L’étude de sol relève les premières caractéristiques du gisement potentiel.
2. Caractérisation de la composition de la terre
- Plasticité : Des essais tels que le test du boudin , Test de la pastille et le test de la boule permettent de vérifier la malléabilité de la terre et sa capacité à former des éléments solides sans fissuration.
- Analyse granulométrique : Un test de sédimentation peut être effectué pour évaluer la proportion de particules fines (argile, limon) et plus grossières (sable, gravier).
- Les analyses granulometriques, utilisées seules, sont remises en causes. Il est essentiel d’avoir une approche complémentaire.
- La matière organique : La préconisation principale pour qu’une terre soit considérée comme adaptée a la construction en terre est que la teneur en matière organique soit négligeable. La teneur en matière organique est mesurée par l’essai de calcination et l’essai d’odeur.
3. Premiers tests et prototypes
• Compression (cisaillement) et cohésion : Pour évaluer la capacité de la terre à être compactée sans se désagréger, des essais de compactage simple sont souvent suffisants. Ces tests in situ ne nécessitent ni laboratoire ni outils complexes mais donnent des indications précieuses pour les premières validations.
- Réactivité à l’eau/ Erosion : Appliquer de l’eau sur un échantillon sec pour observer sa résistance. Si l’échantillon se délite trop facilement, cela peut indiquer une faible résilience aux intempéries, nécessitant alors un ajout de stabilisant naturel (chaux, fibres végétales).
Tests de laboratoire pour la caractérisation avancée
Dans certains cas, des analyses plus approfondies en laboratoire sont recommandées pour des projets de plus grande envergure ou des applications structurelles. Ces essais, mentionnés dans le CCTP (Cahier des Clauses Techniques Particulières), permettent de vérifier des paramètres plus spécifiques.
1. Résistance à la compression
• Objectif : Valider la solidité des éléments en terre (briques, blocs de pisé) après séchage, en testant leur capacité à supporter des charges.
- Procédure : Les échantillons sont soumis à une pression croissante jusqu’à rupture. Ce test permet de déterminer si la terre peut être utilisée dans des structures porteuses.
2. Réaction hygrométrique
• Objectif : Évaluer la capacité de la terre à absorber et à relâcher l’humidité sans se déformer.
- Importance : Ce test est crucial pour les enduits intérieurs, car il permet d’assurer un climat intérieur sain en limitant les variations d’humidité.
3. Analyse chimique et teneur en argile
• Objectif : Identifier la composition exacte de la terre, notamment sa teneur en argile, afin de déterminer le potentiel liant du matériau.
- Procédure : Des tests de laboratoire détaillent les minéraux argileux et la proportion de particules fines, influençant la plasticité et la durabilité.
Critères de validation de la convenance de la terre
Pour que la terre soit considérée comme adéquate pour la construction en terre crue, elle doit respecter plusieurs critères définis par les guides de bonnes pratiques de la construction en terre crue.
Ces critères sont ajustés en fonction de l’usage prévu (structure, remplissage, enduit) et incluent :
• Composition équilibrée : La terre doit contenir un pourcentage d’argile suffisant pour assurer la cohésion sans excéder un seuil qui pourrait causer un retrait excessif.
• Stabilité dimensionnelle : La terre doit présenter un retrait minimal lors du séchage afin de limiter les risques de fissures.
- Résistance aux contraintes : Une bonne résistance à la compression et une stabilité hygrométrique sont nécessaires, particulièrement pour les murs porteurs et les enduits exposés.
- Durabilité et résistance aux intempéries : La terre doit supporter les variations climatiques, et, si nécessaire, être renforcée par des stabilisants naturels.
Pour les projets souhaitant utiliser la terre de site, il sera primordial d’adapter les techniques mises en oeuvre aux caractéristiques du gisement de terre.
Références et ressources complémentaires
Pour approfondir les connaissances sur les tests de convenance et les méthodes de caractérisation de la terre crue, les sources suivantes fournissent des analyses détaillées et des exemples de projets réussis :
https://projet-national-terre.univ-gustave-eiffel.fr
Ils nous ont fait confiance
[desterres] Étude des gisements et création d’une filière terre crue en Nouvelle Aquitaine.
2021-2022
Chapeau et Bottes en collaboration avec le bureau d’étude Intersection et le collectif CANCAN a piloté le projet de recherche pour construire une filière terre crue en Nouvelle Aquitaine.
Le projet a quantifié et caractérisé des terres locales et à identifier les modes constructifs les mieux adaptés afin de proposer aux différents acteurs néo-aquitains des solutions bas carbone et à haut impact social. 40 gisements ont été étudiés et des prototypes réalisés et exposés dans notre lieu de démonstration à Bègles en Gironde,
Projet co financé par la Région Nouvelle Aquitaine et la Métropole de Bordeaux
Construction d’une extension pour les locaux de la Communauté de Communes des Coteaux Bordelais à Tresses.
2023
Dans la conception du projet, pilotée par l’agence Moonwalk Local, il est prévu à la jonction entre bâtiment existant et extension, un volume de circulation de type «verrière». Le mur à l’interface entre cette verrière et le nouveau volume est prévu en ossature bois avec un remplissage ou parement par une technique de construction en terre crue à définir en fonction des caractéristiques des terres disponibles.
C’est dans ce contexte que l’équipe du projet fait appel à Chapeau et Bottes, en association avec le bureau d’études Intersections, en phase conception, afin de mener à bien une étude permettant d’identifier des terres locales et d’en déterminer la compatibilité avec les techniques de mises en œuvre souhaitées pour ce mur.
